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La Révolution Française à Nogent le Rotrou

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La Révolution Française à Nogent le Rotrou
  • Nogent-le-Rotrou et son district durant la Révolution française avec des incursions dans les zones voisines ( Sarthe, Orne, Loir-et-Cher voire Loiret ). L'angle d'attaque des études privilégie les mouvements sociaux et les archives locales et départemental
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24 janvier 2016

Le Maximum.

Image1Si la taxation du prix des denrées forma, sous la Révolution, un des moteurs des mouvements populaires, ce n'était pas une pratique nouvelle[1], ce fut même une pratique extrêmement courante au cours des émeutes de subsistances si nombreuses durant la seconde moitié du XVIIIe siècle. Elle s’accompagnait systématiquement de l'accusation de manipulations de la part des accapareurs[2] voire de véritables complots[3] .

Les mauvaises récoltes de 1788 entraînèrent une recrudescence de ces revendications  dès la fin de l’hiver suivant et ce jusqu’au moment

Image3des moissons[4]. La dévalorisation des assignats participa à la raréfaction des denrées sur les marchés dès 1790, les réquisitions destinées à fournir les armées, à partir de 1792, contribuèrent également à accentuer les difficultés d’approvisionnement en grain ou en pain pour les artisans et ouvriers des villes mais aussi pour les journaliers ou les artisans des manufactures dans les campagnes. Ceux-ci multiplièrent les émeutes de marché, taxant les marchandises, organisant des visites et réquisitions chez les laboureurs ou arrêtant les convois de grains sur les routes ou les fleuves.

Image2

 A partir de 1792, année qui connût deux vastes mouvements de virées taxatrices au printemps et à l’automne,  les difficultés d’approvisionnement des marchés devinrent un problème politique majeur. A l’automne 1792 et durant l’hiver suivant le pain fut fréquemment taxé sur les marchés des grandes villes.

Image4Mais les Girondins, qui dominaient alors la Convention, repoussaient toute idée de limitation de la liberté du commerce. Le 8 décembre 1792, après de longs débats, la Convention vota la peine de mort contre ceux s’opposant à la libre circulation des grains ( cette loi ne faisait que conforter la loi martiale votée par la Constituante dès le 21 octobre 1789 ). Durant le printemps 1793, les Enragés firent de la revendication d’un prix imposé ( le maximum ) leur revendication principale.

Le 4 mai 1793,  à la Convention les Montagnards faisaient voter le premier maximum départemental : taxation des prix des grains par chaque département en fonction des prix moyens des premiers mois de l’année, recensement des stocks par les municipalités, les districts pouvant réquisitionner les grains pour approvisionner les marchés. Cependant ce premier maximum fonctionna mal à cause des différences de prix d’un département à l’autre, et aussi du fait que souvent les administrations départementales l’appliquèrent de façon indulgente pour ne pas dire laxiste. Ce qui entraîna de nouveaux mouvements dans la Bassin Parisien et de grandes manifestations parisiennes encouragées par les Enragés les 4 et 6 septembre 1793.

Le 11 septembre 1793, la Convention imposait un maximum général pour les grains, leur prix étant fixé à 14# le quintal auquel s’ajoutaient les frais de transport. Le 29 du même mois, elle décrétait les maximum des prix et des salaires, pour les marchandises, autres que les grains, les prix étaient fixés à celui de 1790 augmenté d’un tiers[5], pour les salaires on les fixaient à une fois et demi ceux de 1790.  Les districts fixaient des réquisitions de grains aux communes pour fournir les marchés, des visites à domiciles organisées par les municipalités, les comités révolutionnaires ou les sociétés populaires, permettaient de recenser les produits. Le battage des grains était également organisé par les administrations de district.

Image5 RobespierreLe 27 octobre 1793, la Convention nommait une Commission des Subsistances pour fixer un tarif général, tarif proclamé le 21 février 1794. Le système fonctionna à peu près dès le mois de novembre 1793 malgré de nombreux dysfonctionnements et des oppositions de la part  des paysans aisés cherchant à déserter les marchés, mais les mobilisations populaires et celles des autorités les forcèrent à se soumettre à la loi. Dans certaines ville, le maximum des salaires entraînait de fait à une baisse, le Comité de salut public fut même contraint d’accorder, le 10 juin 1794, une augmentation de salaire dans les régies travaillant pour la défense nationale, augmentation jugée dérisoire par les travailleurs.

Après le 9 Thermidor an II ( 27 juillet 1794 ) et la chute des Robespierristes, le maximum fut prolongé pour une durée d’un  an le 21 fructidor an II (7 septembre 1794 ) mais appliqué de façon beaucoup moins stricte. La 19 brumaire an III ( 9 novembre  1794 ), le maximum national fut remplacé par un maximum au niveau des districts. Cependant, dès le 14 brumaire an II ( 4 novembre 1794 ) la Convention commandait un rapport sur les inconvénient du maximum. Finalement celui-ci fut supprimé le 3 nivôse an III ( 23 décembre 1794 ), ce qui entraîna une  augmentation des prix extraordinaire dès le début de l’année 1795[6], ce qui obligea les thermidoriens maintenir les réquisitions, jusqu’en 1796, et le contrôle de la circulation des grains jusqu’en 1797.

 


[1] Voir l’article consacré aux subsistances durant le XVIIIème siècle sur ce blog (  en cliquant là  )  ; et celui consacré à la notion de « juste » prix » ( ici  ).

Voir surtout les travaux du professeur Jean Nicolas :

Mouvements populaires et conscience sociale XVIe-XIXe siècles. Paris : Maloine, 1985.

La rébellion française, mouvements populaires et conscience sociale 1661-1789. Paris : Le Seuil, 2002.

[2] Certaines catégories étaient soupçonnés en priorité : marchands de blé bien sûr ( les blatiers ), mais aussi les laboureurs ou les meuniers.

[3] Steven l. KAPLAN. Le complot de famine : histoire d’une rumeur au XVIIIe siècle. Paris : Librairie Armand Colin, 1982.

[4] Pour le district de Nogent-le-Rotrou voir les articles suivants : http://www.nogentrev.fr/archives/en_1789_/index.html

[5] Certains prix étaient fixés nationalement ( tabac, sel, savon ), d’autres au niveau de la commune ( bois, charbon ), les autres au niveau du district.

[6] Cette crise de subsistance déboucha sur les dernières journées insurrectionnelles de la Sans culotterie parisienne au printemps 1795 ( journées de Germinal et Prairial an III ).

 

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